Création, écriture, réalisation, interprétation d’un film entièrement tourné avec un drone, piloté par des adolescents.
Sur deux samedis successifs en janvier 2017, la ville de Niort, en partenariat avec la FRMJC de Poitou Charentes et dans le cadre du dispositif Passeurs d’images, j’ai proposé un atelier de réalisation de film avec drone, intitulé « Filmer la peur ». Le but de ce film était d’être diffusé, quinze jours après sa réalisation, dans le cadre d’un festival de polar à Niort, « Regards Noirs ». Projet accompagné par David Audouit (Chargé de manifestations culturelles - Ville de Niort) et Alice Chaput-Yogo (Médiatrice Passeurs d’images - FRMJC Poitou-Charentes).
Voici le film, « L’avertissement » (7’41s, 2017), réalisé collectivement par les adolescents dans le cadre de cet atelier :
Film réalisé dans le cadre de la coordination régionale Passeurs d’Images
Fédération Régionale des Maisons des Jeunes et de la Culture de Poitou-Charentes
Avec le soutien de :
Direction Régionale des Affaires Culturelles Nouvelle Aquitaine
Conseil Régional Nouvelle Aquitaine
DR-D-JSCS Nouvelle-Aquitaine
Quelle a été la démarche qui a permis de réussir, en deux jours, avec un groupe d’une dizaine d’adolescents, à réaliser un film construit, scénarisé, sur une thématique et qui plus est tourné avec une technologie compliquée (mais passionnante) qu’est le drone, l’appareil ayant été piloté par les adolescents eux-mêmes ?
Premier samedi
Deuxième samedi
Piloter un drone est une expérience impressionnante, car la maîtrise en est difficile, c’est un objet volant, bruyant, rapide, qui semble dangereux (mais le modèle choisi, un Parrot Bebop, n’est pas dangereux, donc il est exploitable en atelier). Les jeunes avaient, presque tous, très peur avant de tourner leur scène, ne se sentaient pas capables. Mais chacun s’est risqué. Mon travail fut de produire un cadre suffisamment rassurant pour que chacun ose prendre un risque. Comment on fait pour produire ce cadre ? Eh bien par exemple, le jeune qui va piloter qui dit qu’il ne se sent pas capable, qu’il a peur, etc, c’est l’écouter avec bienveillance mais quand même lui mettre le drone dans les mains et le lui faire démarrer. Et c’est parce qu’il y a ce vrai risque (d’autant plus vrai qu’il est encadré, c’est le paradoxe pédagogique, sujet qu’on pourrait beaucoup développer) qu’il se produit quelque chose de l’ordre de la vie, qui à mon sens se sent dans les images, et rend le film intéressant pour un spectateur.
Bien-sûr, après cette expérience de vie forte, et d’autant plus avec la qualité des images produites, les jeunes furent d’autant plus fiers, et l’expérience fut d’autant plus constructive pour eux.
Le cadre dans lequel on prend vraiment des risques est beaucoup plus productif en termes de création et de qualité de travail que le cadre avec lequel on essaie de se rasssurer. Au niveau personnel de l’intervenant, comment faire pour tenir ce type de cadre ? Eh bien c’est décider de faire confiance aux jeunes, par exemple au préado de 12 ans terrorisé à l’idée de piloter un drone, dans un parking au milieu des voitures et des gens, quand soi-même on a très peur. Donc qu’on se risque soi-même, réellement, à la situation, qu’on vit aussi des émotions fortes, mais qu’on donne sa pleine et entière confiance et la responsabilité à l’autre. Alors l’autre se hisse à ce niveau là, et se dépasse.
Le drone se « démocratise », commence à entrer dans notre quotidien. Le monde vu d’en haut, le monde réel vu par cet oeil volant, désincarné, comme dans notre vision des mondes virtuels... notre représentation du monde change, du fait de ce nouveau « regard », qui se répand.
Mais quel est le point de vue de cet oeil désincarné ? Quel positionnement politique porte-t-il ? Quelles nouvelles esthétiques en découlent ? Quels rapports au corps, au territoire, à l’architecture s’y déploient ? Bref, que se passe-t-il pour notre vision du monde ?
Il me semble important d’explorer l’usage de ces machines dans leur dimension d’objets de production d’images. Des workshops pour des usages détournés, créatifs, distanciés, pour ne pas perdre l’esprit critique !